The Bibliothèque Lennoxville Library is thrilled to introduce its first Poet in Residence, Steve Luxton.

Teacher of creative writing, publisher, and author of the poetry collections, Iridium, Luna Moth, In the Vision of Birds, and the Dying Meteorologist, Steve will offer a number of public events for the library community over the course of 2021.
A Townshipper by adoption, Steve’s often funny but also poignant and profound work is deeply embedded in the nature of our region.

We present to you here a series of his poems with French translation by Maryse Laplante. Maryse holds a master’s degree in literary translation and translation studies from the Université de Sherbrooke. She is particularly interested in the translation of nature writing and especially the poetry of this literary genre. She has been living in the Eastern Townships for over ten years.

Steve’s residency is made possible by generous financial support from the Townshipper’s Foundation.


la Bibliothèque Lennoxville Library est ravie de présenter son premier poète en résidence, Steve Luxton.

Professeur d’écriture créative, éditeur et auteur des recueils de poésie Iridium, Luna Moth, In the Vision of Birds et the Dying Meteorologist, Steve offrira un certain nombre d’événements publics à la communauté de la bibliothèque au cours de l’année 2021.


L’œuvre de Steve, un Townshipper d’adoption, est ancrée dans la nature de notre région et son écriture est souvent empreinte d’humour tout en étant émouvante et profonde.

Nous vous présentons ici une série de ses poèmes avec une traduction en français de Maryse Laplante. Maryse détient une maîtrise en traduction littéraire et traductologie de l’Université de Sherbrooke. Elle s’intéresse particulièrement à la traduction de l’écriture de la nature et surtout à la poésie de ce genre littéraire. Elle réside dans les Cantons-de-l’Est depuis plus de dix ans.

La résidence de Steve est rendue possible grâce au soutien financier de la Townshipper’s Foundation.


OF PHILIP HENRY GOSSE

He should have been skeptical.

He was earnest and optimistic (and already

showing signs of being painstakingly religious.)

He was, after all, a cheerful,

Victorian, English small-town lad.

And church-sermoned to abhor and beware

Evil, he knew nothing practical

about it, viz. how Land Company pamphlets’

descriptions and come-ons portraying a latest

stretch of Canadian real estate as a potential

agricultural paradise were pure puffery.

The growing season in the Eastern Townships

of Lower Canada, they claimed, was so long and balmy,

and the loam so deep and rich, it almost

snatched the seed from your hand and took

over from there. “Here, eager novice. Let me!  

I’ll grow your corn shoulder high. Just relax, sit back

and enjoy a life brimful with leisure:

mingle with equally fortunate local gentlefolk,

pursue the Arts, and the mind’s higher callings, etc.”

That was the hook that caught our young Gosse:

he’d buy a farm, (surely, there’d be

some already cleared and for sale—no need to

purchase from a land company), work it part time, read, investigate

and study the countryside—particularly its gorgeous insects, a personal

passion—write, and enact the ceremonies of

his stern and pure Christian sect, The Plymouth Brethren.

Maybe he might make some new converts among

other English men and women transplanted and

farming around Compton on the River Coaticook

—the name of former occupants apparently.

And so, he ventured forth, another Adam, snake-bit

by soft sell and his own illusions,

a yearning babe in the bug-filled woods.

DE PHILIP HENRY GOSSE

Il aurait dû être sceptique.

Il était enthousiaste et optimiste (et montrait déjà

des signes de ferveur religieuse).

Il était, après tout, un p’tit gars

victorien enjoué d’un patelin anglais.

Bien sermoné à l’église, il abhorrait le

Mal et s’en méfiait, bien qu’il n’en sache

rien de concret i.e. que les descriptions des brochures

de la Land Company décrivant de nouvelles

terres canadiennes comme un possible

paradis agricole n’étaient que battage publicitaire.

La saison des cultures dans les Cantons-de-l’Est

du Bas-Canada était, prétendait-on, si longue, si douce

et le sol si riche qu’il vous arrachait presque

les semences des mains pour accomplir lui-même

tout le travail. « Allez, le débutant plein d’entrain, laisse-moi faire!

Je vais te faire pousser du maïs haut jusqu’aux épaules. Assieds-toi,

consacre du temps aux arts et autres vocations nobles, etc. »

Voilà ce qui attira notre jeune Gosse :

il allait acheter une ferme (sûrement qu’il y avait des

terres déjà défrichées à vendre – nul besoin de faire

affaire avec une société foncière), la travailler à temps partiel, lire écrire, explorer

et étudier la campagne environnante – surtout ses superbes insectes, une passion

à lui – rédiger et célébrer les cérémonies pour

Les frères de Plymouth, sa secte chrétienne pure et stricte.

Il convertirait peut-être certains

des autres anglais, eux aussi de nouveaux fermiers

transplantés dans les environs de Compton le long de la rivière Coaticook

– le nom d’anciens habitants, semblerait-il.

Il s’aventura donc, un autre Adam, mordu par le serpent

de la persuasion discrète et de ses propres illusions,

un jeune plein d’espoir dans les bois plein de bibittes.


THE LAST BAD COUNTRY

Earnest Hemingway titles his great tale

“The Last Good Country” and describes a still unlogged,

lovely wilderness remnant that Nick Adams and his

younger sister, Littless, flee to and enjoy

a deep if brief idyll.

But this patch of the Eastern Townships has earned no such honorific.

It’s called the Brulé—French for a burnt country or land

full of rocks and scrub growth.

The name and reputation of the place go back:

pioneer-farming nearby in 1835, the youthful English naturalist

Philip Henry Goss employs it.

He writes of a stretch of several thousand acres where

because of beavers damming up creeks,

water had killed much timber.

Locals also described it as a haunt of

marauding wolves and bears.

A colonists’ hell! Though, when one September day,

the curious Goss and his reluctant kid brother, Tom,

went bushwhacking, they encountered no wolves, bears, or

beaver even. All likely already shot or trapped by then.

A bird buff, Goss also mentions none,

no woodpeckers and certainly no prothonotary warblers.

But the two hikers got smeared with stinking, crushed aphids.

An unmemorable emptiness then, but for the bug guts.

A place clearly to avoid.

—Which is why, though bulldozer-trimmed over

the years to a hundred or so uncultivatable acres, it is

still here—a spruce-ringed, coal-black pond-scattered bog

whose quaking sphagnum carpet sucks at you like History,

and swallows you into solitude and silence

that you feel always has and will be.

—Philip Henry, brother, are you there?!

LE DERNIER LAID COIN DE PAYS

Ernest Hemingway intitule son grand récit

Le Dernier beau coin de pays et y décrit un joli bout

de paysage sauvage encore intact, où se réfugient Nick Adams et sa

petite sœur Littless le temps

d’une brève mais profonde idylle.

Mais ce coin des Cantons-de-l’Est n’a pas reçu un tel titre honorifique.

On l’appelle le Brûlé – un terme qui désigne un pays ravagé par le feu ou

une terre de roches et d’arbustes rabougris.

Le nom et la réputation de ce lieu remontent dans le temps :

le jeune naturaliste anglais Philip Henry Gosse, fermier pionnier qui

cultive la terre dans le coin en 1835, emploie le terme.

Il décrit une étendue de milliers d’acres où,

à cause des barrages de castors sur les ruisseaux,

l’eau a tué les arbres.

Les gens de la place décrivent l’endroit comme le repaire

de loups et d’ours maraudeurs.

L’enfer pour un colon! Pourtant, par un jour de septembre,

le curieux Gosse et Tom, son petit frère hésitant,

vont se promener dans la broussaille et ne croisent ni loups, ni ours, ni même

castors. Tous déjà chassés au fusil ou à la trappe sans doute.

Mordu d’ornithologie, Gosse ne mentionne aucun oiseau,

pas de pics et certainement pas de parulines orangées.

Mais les deux randonneurs sont tachés de pucerons puants écrasés.

Un vide vite oublié donc, sauf pour les viscères d’insectes.

Un endroit à éviter, de toute évidence.

– C’est pourquoi il est encore là, malgré que les bulldozers l’aient débroussaillé,

au fil des ans, en une centaine d’acres incultivables –

une tourbière cernée d’épinettes et parsemée d’étangs noir charbon

dont le tapis tremblant de mousse de sphaigne vous tire vers lui comme l’Histoire

et vous avale dans une solitude et un silence

qui semble toujours avoir été là et y être à jamais.

– Philip Henry, mon frère, es-tu là?!


REQUIEM FOR THERESA ALLARD (1959-1978)

I know the low, reedy spot by the river where

one April your body was discovered by

a muskrat trapper, whom I also happened to know,

plus, the stretch of rural two-lane you often hitch-hiked.

And, very well, the small-town college you

were a student at when you went missing,

strangled by some predator.

I had, earlier, taught English there.

 

You see, Theresa, though I never met you,

and at the time did not, having moved elsewhere, even

hear of your disappearance, I knew and know

so many of the places and things—

daily, mundane, yet mutely enigmatic—

where, though you were cruelly seized from them,

you are still hauntingly there,

like a shape in the river mud left

by a removed body, that persistently remains….

 

Theresa, I know

everything and nothing,

the nagging un-answers dumped

savagely on the sodden ground.

REQUIEM POUR THERESA ALLARD (1959-1978)

Je connais les terres basses envahies de roseaux au bord de la rivière où

un certain mois d’avril ton corps a été retrouvé par

un trappeur de rats musqués, que je connais aussi,

en plus du tronçon de route de campagne à deux voies où tu faisais souvent de l’auto-stop.

Et très bien aussi, le collège dans la petite ville où tu

étudiais et où tu as disparu,

étranglée par un prédateur.

J’y avais auparavant enseigné l’anglais.

 

Tu vois Theresa, quoique je ne t’aie jamais rencontrée,

et qu’à l’époque, étant déjà déménagé ailleurs, je n’avais même

pas entendu parler de ta disparition, je connaissais et connais

tant de lieux et de choses –

du quotidien, ordinaires, pourtant sourdement énigmatiques–

qui sont, bien que tu en aies été cruellement arrachée,

toujours hantés par ta présence,

comme une forme laissée dans la boue d’une rivière

par un corps qui en a été retiré, mais qui ne cesse d’être là …

 

Theresa, je connais

tout et je ne sais rien,

les non-réponses obstinées jetées

sauvagement sur le sol détrempé.


POEM FOR NEW YEAR’S DAY

 

First thing, eight stories above

the grey, Euclidian sprawl of the city, I nudge

the cat from the bed, get up and

step to the window.

 

I watch the day catch fire

and know the Old Year is done and past,

 

as good, as bad as many:

my work pushes forward,

my wife is still tender towards me,

a close friend has died, two others have survived.

Beyond the near horizon, just like individual men and women,

nations clash, wanting more, never less.

No, despite the brightness of last New Year’s,

little has changed.

 

Yet, beyond the frost-sequined windows,

the sun lifts. Its fiery, speckled

face is unutterably beautiful.

I look at it aslant, illuminated.

Nothing is new, all is new.

 

While I’ve been musing, the cat has

come to the window, too.

She settles on the sill and fixes

the sun with a similar gaze.

For long minutes we attend the red daybreak.

POÈME DU JOUR DE L’AN

 

Au réveil, huit étages au-dessus

de la grisaille de l’étalement euclidien de la ville, je pousse

la chatte hors du lit, me lève et

me rends à la fenêtre.

 

Je regarde le jour s’embraser

et je sais que l’Ancienne Année est bel et bien finie,

 

aussi bonne, aussi mauvaise, comme tant d’autres :

mon travail va de l’avant,

ma femme est encore tendre à mon égard,

un bon ami est mort, deux autres ont survécu.

Au-delà de l’horizon immédiat,comme les hommes et les femmes,

les nations s’entrechoquent, cherchent toujours plus, jamais moins.

Non, malgré la lumière vive de la dernière Nouvelle Année,

peu de choses ont changé.

 

Pourtant, derrière les fenêtres pailletées de frimas,

le soleil monte. Son visage ardent

moucheté est d’une beauté sans mot.

Je l’observe d’un regard oblique, ébloui.

Rien n’est nouveau, tout est neuf.

 

Durant ma rêverie, la chatte

me rejoint à la fenêtre.

Elle s’installe sur l’allège et fixe

le soleil d’un regard similaire au mien.

Pendant de longues minutes, nous assistons à l’aube rouge.


FUR TRADE

(from In the Vision of Birds: new and selected poems, 2012)

 

Had I, instead of wandering

the forested back lot this fall,

re-stuffed the cabin walls,

January’s subzero drafts

wouldn’t numb my thighs.

 

True. But at night, writing here in my chair,

I’d not know how

over that snow-banked ridge,

beside the beaver pond spillway,

now all but frozen shut,

 

wolves ring and feast on a buck,

then convene on the big cap-rock

that overlooks the valley and my white roof

to celebrate their full bellies and wild estate

with stern and lovely ululations….

 

In this frost-spiked room,

momentarily immune from the cold,

I envision and hear them.

Like the wild things wintering in my walls,

my dreams eat the insulation.

TRAITE DE LA FOURRURE

 

Si j’avais, au lieu d’errer

dans le boisé derrière chez moi cet automne,

re-fourré les murs du chalet,

janvier et ses courants d’air sous-zéro n’engourdiraient pas mes cuisses.

 

C’est vrai. Mais le soir, assis ici en train d’écrire,

je ne saurais pas

qu’au-delà de la crête enneigée,

près du déservoir de l’étang à castor

à présent presque complètement gelé,

 

des loups cernent un buck et s’en régalent,

puis se rassemblent sur le roc

qui surplombe la vallée et mon toit blanc

pour célébrer leurs ventres pleins et leur domaine sauvage

à coup de hurlements nobles et mélodieux…

 

Dans cette pièce enivrée de gel,

immunisé un moment contre le froid,

je les imagine et les entends.

Telles les créatures sauvages hivernant dans les murs,

mes rêves grignotent l’isolant.


WINTRY CITY

(from The Dying Meteorologist and Other Poems, 2019)

 

As I head back from a side-street bar, then a dimly

lit coffee spot, the subzero geometry of

narrow streets embraces me like an old romance.

 

I recall now, we once did dance.

Twirled in scarves and furs, I and other young things

waltzed blithely out of doors into January’s blue jaws, rushing

over snow and treacherous slipperiness, seeking

another refuge Cold had made warm and cozy.

Besieged, we cuddled together, no longer cool and wary.

 

Or, in this Frozen-ness, is this an insulating memory?

Even a slow heat-leak?

Damn! it’s cold.

Hell’s heat is oversold.

Better get home, and hurry!

The iron cheek of the North Wind’s axe presses

against my skin.

 

But there’s a glamor to this polar place,

its concrete, steel and plastic waste,

where bundled strangers, still out, grin at me

like found friends.

VILLE D’HIVER

 

 

En revenant d’un bar d’une rue secondaire, un café mal éclairé

d’avant, la géométrie sous-zéro des

rues étroites m’enlace comme une vieille romance.

 

Je me rappelle, nous avons dansé ici autrefois.

Tournicotés dans nos foulards et fourrures, moi et d’autres jeunesses

valsions joyeusement vers les crocs bleus de janvier, filant

dans la neige et sur la glace sournoise, à la recherche

d’un autre refuge fait chaleureux par Le froid.

Assiégés, nous nous serrions l’un contre l’autre, désormais sans méfiance et froideur.

 

Peut-être, dans cette Glacial-ité, n’est-ce là qu’un souvenir isolant.

Ou juste une lente fuite de chaleur.

Maudit qu’il fait frette!

La chaleur des Enfers est surfaite.

Mieux vaut rentrer, et vite!

La joue de fer de la hache du Vent du Nord se presse

contre ma peau.

 

Mais il y a un certain chic à ce lieu polaire,

ses déchets de plastique, béton, acier,

où des étrangers emmitouflés, encore dehors, me sourient

comme des amis trouvés.

 


SUSPENSION

 

Mid-March, the snow unseizes and

dissolves in a cold boil.

 

North of the village, the high pasture is

capped by melt fog that deer,

ravenous for newly revealed greenness,

cloak themselves in.

 

Near its top, I spot a couple, then several more

slim-limbed shapes,

spectral as after-images, or before?

.

Heads cocked at first, then lowered, they stay,

and let me step close as though, in

this mysterious once-a-year mist,

an occult moratorium exists

 

in which we are otherworldly brethren.

SUSPENSION

 

Mi-mars, la neige se défige et

se dissout dans un bouillonnement froid.

 

Au nord du village, le haut pâturage est

coiffé d’un brouillard de fonte dans lequel les chevreuils,

affamés de verdures à peine révélées,

s’enveloppent.

 

J’en aperçois deux au loin, puis plusieurs autres

silhouettes graciles,

spectrales telles des images rémanentes. Ou des prémonitions?

 

Ils dressent la tête, puis la baissent, ils restent là

et me laissent m’approcher, comme si

dans cette mystérieuse brume annuelle

existait un moratoire occulte

 

où nous appartenons à une confrérie d’un autre monde.


THAW-METAPHOR

 

     Spring insurrection! The once ice-bound

     river now rushes, blackly gleaming,

     flipping logs end over end, stacking up

     debris, tall heads of froth at bends.

   

     –Is an aroused mob,

     close-packed and uncheckable, that

     over-spills flats and pastures, plunders

     gardens, rubs away roads, 

   

     tumbles roaring beneath and rocks

     the new highway bridge

     (shaking muddy fists at shocked and

      delayed traffic),

    

     picks up even greater speed, hurls

     itself downstream, unstoppably

     toward the pale, anxious

     face of the moon.

MÉTAPHORE DE LA FONTE

 

Le printemps se soulève! La rivière que les glaces retenaient

s’élance, noire étincelante,

renverse les troncs, empile

les débris, l’écume épaisse dans les détours.

 

– C’est une foule excitée,

entassée, incontrôlable qui

dévale les plats et pâturages, dévaste

les jardins, efface les routes,

 

déboule sous le nouveau pont et

le secoue en hurlant

(brandit un poing boueux devant

un bouchon outré),

 

accélère encore, incoercible,

se jette dans le courant

vers le pâle visage anxieux

de la lune.


JEFFERSON DAVIS IN LENNOXVILLE

 

After Montreal—his first stop after

release from a Yankee fortress’s cell–

 he travelled overland with wife and children

 to this out of the way, riverside village.

 

 Life in Quebec’s Lennoxville was both cheaper and safer:

 Many Canadians hailed the Northerners’ bloody triumph, but

 many others, fearing the wolfish U.S. policy of Manifest Destiny,

viewed the crushed South as its tragic domestic victim,

And its president, Davis, a noble martyr.

 

–The issue of Negro servitude—which he and his

planter caste believed in their bones to be

God-ordained and reasonable to boot—

did not much vex or concern them.

 

Davis liked them, self-effacing Canadians, even if

they were a shade rude—but in the uncultivated

not the churlish sense.

They left him and his wife to themselves.

He got acquainted with just a few.

 

Though, later, sociable Varina complained of knowing hardly

a soul and of being “buried in Lennoxville”, while

he, also looking back, did so, he owned,

with a faint, but exhilarating nostalgia.

 

He recalled often taking exercise alone, along

the secluded bank of the nearby Massawippi River,

and how he had sometimes caught himself being

distracted, quite inadvertently, from the brooding

might-have-beens and must-be again’s of

his unwavering duty to the great Lost Cause.…

 

–The glisten of a riffle or the cheerful plumage of a bird,

had, you might say, freed him briefly from

the bondage of his unyielding convictions.

JEFFERSON DAVIS À LENNOXVILLE

 

Après Montréal – sa première destination à la suite

de son incarcération dans la cellule d’une forteresse Yankee –

il voyage par voie de terre avec femme et enfants

jusqu’à ce village près d’une rivière et de nulle part.

 

La vie à Lennoxville au Québec est moins chère et plus sûre :

les Canadiens sont nombreux à saluer le triomphe sanglant du Nord, mais

beaucoup, craignant la voracité de la politique américaine de destinée manifeste,

voient le Sud écrasé comme une victime domestique tragique

et Davis, son président, comme un noble martyr.

 

– La question de la servitude des Noirs – que Davis et

sa caste de planteurs croient dur comme fer dictée

par Dieu et voient comme une cause raisonnable par dessus le marché –

ne les contrarie pas particulièrement et ne les inquiète pas davantage.

 

Davis aime bien ces Canadiens modestes, malgré leur

légère impolitesse – ils ne sont pas grossiers,

simplement incultes.

Ils les laissent tranquilles, lui et sa femme.

Il ne fait connaissance qu’avec peu d’entre eux.

 

Mais plus tard Varina, très sociable, se plaindra de n’avoir connu que

quelques âmes et d’avoir été « enterrée à Lennoxville », alors

que Davis, lui, dira se rappeler la ville

avec une douce quoique grisante nostalgie.

 

Il se souviendra s’être souvent promené seul le long

des berges tranquilles de la rivière Massawippi,

et s’être laissé distraire,

par inadvertance, de la menace des

peut-être-que-si et des il-faudrait-que-les-choses-soient-comme-avant

accompagnant son dévouement indéfectible à la grande Cause perdue…

 

– L’éclat de rapides peu profonds ou le plumage coloré d’un oiseau

le libèrent un instant, pour ainsi dire,

des convictions inébranlables qui l’enchaînent.


14 Haiku

14 Haïku

surrounded

by empty pop cans

the highway no littering sign

 

November woods

no snow yet

silent as approaching cat’s feet

 

sub-zero morning

air like the edge of broken glass

the far mountains right on my doorstep

 

wearing two

pairs of gloves

20 frozen fingers

 

each tree limb

a freshly stocked shelf

of snow

 

in the moonlit farmyard snow

the dented ash bucket

glowing blue

 

against the window

the indoor cat on its hind legs

for an outdoor fly

 

beyond the fly-bumped screen door

clumped tiger lilies wag

in the hot wind

 

from stump to twig

facing the spring wind

a first strand of spider silk

 

in the ice-bound stream, a first trickling

like the distant voices of small children

full of wordless promise  

 

the hot spring sun enlarges turkey tracks in the snow

to those of a dinosaur flock

fleeing a flaming asteroid   

 

at evening on spring’s first day, a single bee

hurries past me on its way home

from the village’s snow drops

 

my back road churned by a truck

lugging sap for boiling in the sugar house

to dark deep unsweetened chocolate

 

sweating heavily, Superman Winter

hastily withdraws from the green, glowing

kryptonite of Spring

 

encerclé

de bouteilles de liqueur vides

le panneau d’autoroute qui défend de jeter des ordures

 

forêt de novembre

pas encore enneigée

silencieuse comme le chat s’approchant

 

matin sous zéro

l’air comme le tranchant du verre brisé

montagnes lointaines à ma porte

 

deux paires

de gants

20 doigts gelés

 

chaque branche d’arbre

une tablette bien garnie

de neige

 

ferme sous la lune

seau à cendres bosselé sur la neige

une lumière bleue

 

contre la fenêtre

le chat d’intérieur sur ses pattes arrière

face à la mouche dehors

 

derrière la porte moustiquaire picotée par les mouches

les touffes d’hémérocalles remuent

dans le vent chaud

 

de la souche à la brindille

face au vent printanier

un premier fil de soie d’araignée

 

dans le ruisseau retenu par les glaces, les premières gouttes

comme les voix lointaines de petits enfants

sont des promesses sans mots

 

sous le chaud soleil du printemps les pistes de dinde sur la neige deviennent

celles d’un troupeau de dinosaures

fuyant un astéroïde en feu

 

premier soir du printemps, une abeille solitaire

me dépasse en rentrant chez elle

des perce-neige du village

 

mon petit chemin de campagne brassé par un camion

qui traine vers la cabane à sucre la sève à bouillir

pour en faire un chocolat noir non sucré

 

suant à grosses gouttes, l’Hiver-Superman

se retire à la hâte du vert et étincelant

printemps-kryptonite

 

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